vendredi 30 octobre 2009

Petit cours sur Daumier

Aujourd'hui, c'était cours sur la lithographie. La dernière partie de mon cours portait sur Daumier, et je voulais aborder deux images en particulier: Gargantua et La Rue Transnonain. Deux images classiques, très connues, et caractéristiques de la caricature politique à l'époque de la monarchie de Juillet. Mais, je ne l'ai pas fait exprès, les rapprochements avec la situation actuelle se sont faits d'eux-mêmes.


Dans la première estampe, Gargantua, Daumier représente Louis-Philippe en ogre qui dévore les écus arrachés au peuple miséreux, et qui sont ensuite transformés en médailles et décorations pour les proches du pouvoir qui se disputent, sous la chaise percée de Louis-Philippe, les déjections du monarque. Daumier fut condamné pour cette estampe: 6 mois de prison pour incitation à la haine envers le monarque. Le rapprochement avec aujourd'hui où l'incitation à la haine contre le monarque est une constante épée de Damoclès au-dessus de la liberté de la presse s'est fait tout naturellement.

Ensuite, La Rue Transnonain, qui représente avec sobriété les conséquences d'une bavure policière qui eut lieu le 14 avril 1834 au cours d'une émeute populaire déclenchée par la loi liberticide contre l'association. Enfin, je n'ai pu m'empêcher de rappeler que c'est sous Louis-Philippe qu'a été réalisé le premier musée d'histoire de France célébrant la gloire nationale, à Versailles, et donc de souligner un autre point de convergence...

Oui, Daumier est d'actualité, et il n'est pas inutile de parler de vieilleries du XIXe siècle. Mais non, le Louis-Philippe d'aujourd'hui n'est pas une poire.

dimanche 18 octobre 2009

Dans les coulisses de la création

Je viens d'écouter la passionnante entrevue qu'Elena Balzamo a accordé à Antoine Perraud pour son émission Tire la langue. Universitaire polyglotte spécialisée dans les contes scandinaves, traductrice et essayiste, Elena Balzamo s'est lancée dans un projet qui lui a valu la bourse jean Gattegno du Centre national du livre: la traduction en trois volumes d'un choix de lettres d'August Strindberg, dont le premier volume vient de sortir chez Zulma.

Je connaissais Elena Balzamo pour ses traductions de contes populaires et littéraires scandinaves, également pour son travail sur la Carta Marina d'Olaus Magnus, mais elle a aussi œuvré dans des domaines moins "merveilleux", comme la traduction du russe de poèmes du goulag ou encore ce travail sur Strindberg. La correspondance d'un écrivain permet sinon d'avoir accès aux différentes étapes de la création de son œuvre, et donc de pénétrer les mécanismes concrets de la création littéraire, du moins d'autoriser une incursion dans la vie personnelle, parfois quotidienne, parfois extraordinaire, où celle-ci a pris sa source. Sans toujours donner d'indications précises sur la génétique des œuvres, elle permet sans doute de mieux en comprendre la genèse: elle donne ici en effet un accès privilégié aux névroses, aux bouillonnements intellectuels et sensibles, à la vie intérieure de l'auteur d'Inferno.

Dans le même registre, il est important de noter la récente publication d'une nouvelle édition du Journal de Delacroix, qui n'était jusqu'à ce jour disponible que dans une édition établie. de manière approximative. Michèle Hannoosh, la chercheuse américaine qui s'est occupée de ce travail titanesque, a pris le soin d'ajouter à son édition des inédits, qui permettent d'augmenter encore la taille des écrits du peintre. Delacroix, fidèle en cela à son époque empreinte du dialogue entre les arts, avait, tel Girodet dans sa jeunesse, envisagé pendant un moment une carrière d'écrivain en lieu et place de celle de peintre, et était pétri de littérature. Le journal de Delacroix était déjà passionnant dans son édition antérieure: il permettait de pénétrer dans les réflexions du peintre à propos de son œuvre et de celle de ses contemporains, mais aussi à propos de la littérature et plus généralement de la société de son temps. Coulisses de la création personnelle, mais aussi formidable témoignage sur la période romantique.

Màj 24-10-09: normalement Michèle Hannoosh devrait venir présenter son édition du Journal de Delacroix le samedi 21 novembre à la librairie Le Livre, à Tours. 80 euros, ça fait un beau cadeau pour les fêtes...

vendredi 2 octobre 2009

Barbe Bleue sur Arte

Cranach l'Ancien - Judith et Holopherne

Mardi prochain, Arte diffuse le téléfilm Barbe Bleue réalisé par Catherine Breillat. Pour l'anecdote, c'est le groupe corrézien pseudo-médiéval Sikinis - dont on peut écouter la musique ici (la Danse des Satyres me fait beaucoup rire personnellement) - qui signe la bande-son. Télérama a l'air assez emballé par le casting et les costumes. Le personnage de Barbe bleue a déjà été incarné plusieurs fois au cinéma (Gary Cooper, Richard Burton, Pierre Brasseur...), et il peut être intéressant d'en voir une nouvelle version. Les puristes auront peut-être des allergies, et retourneront en courant relire les Contes de ma mère l'Oye. Pour ma part je resterai probablement fidèle à mon cher Bartok.